« Contre le dépitonnage », réponse à Claudio Barbier (Jules Van Ausloos, septembre 1967)

Jules Van Ausloos (dit « Hérisson »)
Bulletin mensuel du C.A.B. – Section du Brabant, septembre 1967

Comme l’écrivait Claude Barbier, « depuis des années, les pitons font beaucoup parler d’eux ». D’autres ont, ici, manifesté une opinion opposée à la sienne. Voici, en guise d’épilogue, des extraits d’une lettre de Raymond Coene et, à sa suite, ce que je crois être le point de vue du Conseil d’administration.

« Sans vouloir faire une critique exhaustive des opinions manifestées dans le dernier numéro du bulletin du Brabant, écrit Raymond Coene, je souhaite néanmoins préciser que l’opinion que certains d’entre nous défendent quant au pitonnage des voies (en gros, celle de Barbier), n’est pas seulement l’avis de quelques caïds en mal de publicité, mais est partagée par de très nombreux vrais et grands alpinistes.

En particulier, Mr Lucien Devies, président de la FFM a expliqué, en clôturant le rassemblement international de l’ENSA, et je cite ici un extrait du « Dauphiné Libéré » du 29 juillet :

« Puis le président de la Fédération Française de la Montagne s’éleva vigoureusement contre le suréquipement des voies… C’est extrêmement attristant de voir à notre époque les plus belles voies d’ascension transformées par l’emploi exagéré de pitons, en une succession d’échelles. Je pense que la jeune génération doit trouver une nouvelle éthique de l’alpinisme.
C’est pourquoi je suis particulièrement séduit par le très bel exploit réalisé par nos amis britanniques Boysen et Estcourt qui ont réussi la deuxième ascension de la très difficile face sud de l’Aiguille du Fou en franchissant les passages les plus difficiles en escalade libre. C’est la voie dans laquelle il faut s’engager si l’on veut que l’alpinisme reste source de joie. »

Je dois t’avouer, termine Raymond Coene, que la lecture de ces lignes a en effet été pour moi une très grande source de joie, et j’ose espérer que, dans le prochain bulletin, tu leur accorderas l’importance qu’elles méritent… »

Voilà qui est fait.

Qu’il me soit permis de poser une question. Qui a dit que notre Conseil d’administration ne partage pas totalement le point de vue de MM. Barbier, Bourgeois, Coene et Devies ? Pour ma part, je suis convaincu que, lors de sa dernière séance, le conseil s’est simplement insurgé – à une écrasante majorité – contre les actes individuels qui, inéluctablement, conduisent aux excès, excès qui pourraient très bien ne pas être le fait des plus acharnés épurateurs ! Je suis sûr qu’il ne ferait pas la sourde oreille si, par l’intermédiaire de la Commission des voies, des propositions d’épuration daignaient lui être faites…

Et maintenant, tirons l’échelle. Car cette « guerre des pitons » n’intéresse que bien peu des lecteurs de cette feuille. Pour la simple raison que la majorité d’entre eux ne met jamais un pied sur les rochers belges ; elle se contente de faire de la montagne. Et que ce soit de la montagne plus ou moins facile ne change rien à la question.

Cette majorité souhaite recevoir des informations, des renseignements concernant la montagne, les activités et la vie du club, lire quelque anecdote plaisante. Ils sont des dizaines à m’avoir manifesté leurs regrets devant le virage pris, il y a quelques mois, par ce bulletin. On parait trop, disent-ils, s’attendre au tournant pour s’asséner un coup de patte…

Certains prétendront peut-être que les habitués des rochers belges sont les « forces vives du C.A.B. ». Là, qu’on me permette de douter. Il n’y en a pas mal parmi eux qui, à l’encontre de la majorité dont je parle plus haut, ne mettent jamais un pied en montagne. Ce qui est encore leur droit le plus strict…

HERISSON

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